Pendant un peu moins de deux décennies, entre 1972 et 1986, nous avons compté parmi nous un des plus grands écrivains de science fiction du monde, égal des plus illustres auteurs anglo-saxons.
Michel Jeury, né le 23 janvier 1934 à Razac d'Emet (Dordogne) s'est trouvé vers l'écriture dès les années 50 mais sans rencontrer le succès, malgré le
Prix Jules Verne pour
La Machine du Pouvoir.
Après une pause dans la création littéraire dans les années 60,
Michel Jeury revient à la s-f en 1972 avec
Le Temps Incertain qui marque son époque.
La chronolyse est une façon d'explorer le temps, de dissoudre le temps, de se projeter dans le passé, propulsé par une drogue dans l'esprit de quelqu'un d'autre.
Ainsi le Docteur Robert Holzach va-t-il se retrouver au XXème siècle dans le corps de Daniel Diersant, délégué par les phords de Garichankar pour empêcher les séides inquiétants de Harry Krupp Hitler Ier de faire basculer l'histoire. Diersant, face à une réalité qui se dédouble, se répète, se contredit, écartelé entre les injonctions contradictoires du Docteur Holzach, psychronaute, et des Pêcheurs de la Perte en Ruaba, risque de perdre la raison.
Et notre avenir...
Deux ans plus tard,
Les Singes du Temps, en constituent le second volet.
Bienvenue dans le grand cirque du temps. Simon Clar est projeté dans le temps, dans les avenirs et les passés subjectifs du voyage chronolytique. Des empires se battent, des futurs qui veulent tous advenir se déchirent dans les coulisses de l'Histoire, Force ABC, BODIAC, Asuyos. Il suffit d'un brin de paille pour faire pencher la balance des avenirs.
Simon est un de ces fétus, un des singes du temps qui vagabondent entre les branches des possibles. Et il traverserait l'enfer pour l'amour de Maria-Lisa.
Michel Jeury propose en 1976, le dernier volume de sa trilogie dite de le chronolyse, Soleil Chaud, Poisson des Profondeurs :
2039. Voici venu le temps des hypersystèmes informatique et de la tyrannie des monopoles. C'est la lutte finale pour la domination du genre humain. Les deux supermultinationales, Dunn et Lunar, vont fusionner sous le contrôle de Hamilton. L'église va connaître l'unité annoncée par les prophètes de l'Ancienne et Mystique Eglise Cathpro.
Mais Shri Asanab Van Varagan, numéro 3 de l'Ecosénat, rival de Sir Oswald, s'oppose à la fusion. Et les deux réseaux d'ordinateurs qui contrôlent la planète, Word Losis et Univers Un, vont se battre à mort au risque de détruire la civilisation technologique tout entière.
Pendan,t que le syndrome psychiatrique « Soleil chaud poisson des profondeurs » fait des ravages dans toutes les castes de la population et que, aux portes de l'empire, les cavaliers de Malek Ozoungaria attendent les premiers signes de déconfiture pour donner l'assaut à l'hôpital Garichankar, puis au monde tout entier...
2039 : la fin des hypersystèmes ?
Cette suite romanesque constitue un des cycles majeurs de la science fiction française et figure au panthéon mondial.
En 1982, le roman L'Orbe et la Roue, remet Jeury au centre de la littérature d'anticipation.
Quand Mark Jervann d'Angun ressuscite, dix mille ans après sa première mort, on prétend l'obliger à changer de nom. Et parce qu'il refuse, il va lui falloir retourner dans l'univers-ombre, dans l'oubli.
Quand il renaît une nouvelle fois, vingt mille ans plus tard, sur une planète marine, le monde a bien changé. Les planètes du système solaire ont disparu. Broyées, elles ont servi à construire la Sphère de Govan qui entoure le soleil de ses milliers de mondes artificiels. Et la science s'est mise à ressembler à la magie.
Mark d'Angun se réveille en plein conflit. Entre les Ingénieurs qui ont construit la Sphère et les Seigneurs qui la possèdent. Mais la Sphère elle-même, forte de ses cerveaux artificiels, est en train de s'éveiller à la conscience...
Le Jeu du Monde, paru en 1985, est la dernière pierre remarquable du monument de Michel Jeury.
Bruno Mansa est entraîneur de Jeu troyen. Un entraîneur très entouré et très disputé dans une société où le jeu est devenu la principale activité sociale. Il y a les jeux de compétition et les jeux de hasard. Et Mansa, lors d'une remise en jeu, perd tout, ses points, sa situation.
Avec 287 points, on ne va pas loin, on peut tout au plus tenir un rôle de figurant dans un jeu de rôles grandeur nature. Mais il lui faut remonter la pente et aller voir dans les coulisses si le hasard n'est pas tricheur.
Dans un monde de simulations, où commence le réel ?
Puis il quitte le domaine littéraire qui a fait sa renommé pour proposer des romans régionalistes ou mémoriels.
Il n'y revient qu'épisodiquement à la fin du XX° siècle et du début du XXI°.
Il a publié aussi un certain nombre de recueils de nouvelles.
Il s'éteint le 9 janvier 2015 à Vaison la Romaine.
Gloire nationale méconnue d'un genre trop peu médiatisée, Michel Jeury est un auteur capital à (re)découvrir d'urgence.