Raoul Ponchon est un poète français.
Il a vu le jour à La Roche-sur-Yon (Napoléon-Vendée à l'époque) le 30 décembre 1848 dans une famille de militaire.
Après avoir passé son enfance à suivre les garnisons de son père, il vint chercher fortune à Paris où il est employé dans diverses banques et compagnies d'assurances.
Conscient de n'être pas doué pour les métiers de la finance, il tente sa chance comme peintre.
Paradoxalement, c'est en rédigeant le catalogue du Salon Poil et Plume où il expose, qu'il se fait remarquer pour ses talents d'écriture.
Raoul fréquente les salons littéraires et le milieu journalistique : il publie dans le "Courrier français" (1887-1907) puis dans le " Journal", une "gazette rimée" hebdomadaire (au total plus de cent cinquante mille vers), dans laquelle il commentait les événements contemporains.
Il côtoie de nombreuses personnalités artistiques, littéraires et politiques du temps.
Il devient membre de plusieurs cercles plus ou moins informels d'écrivains et se lie très intimement avec son confrère Jean Richepin et considère celui-ci et sa femme comme sa famille.
De toutes ses chroniques, il tire un modeste florilège d'histoires piquantes, qu'il réunit dans le volume "La Muse au cabaret" (1920), suivi par " La Muse gaillarde" en 1937.
Pochon par Gustave Soury |
Il fut élu en 1924 à l'Académie Goncourt, alors qu'il ne publie quasiment plus.
Il meurt des suites d'une chute domestique (en se levant de son lit !) le 3 décembre 1937.
Il est enterré aux côtés de son ami Jean Richepin, au cimetière de Pléneuf-Val-André dans les Côtes-d'-Armor
Raoul Ponchon est l'immortel auteur de ces aphorismes qui circulent encore de nos jours et dont on ignore la paternité :
« Quand mon verre est vide
Je le plains
Quand mon verre est plein
Je le vide. »
« Le veau réchauffé est meilleur froid. »
« Si les muets pouvaient parler, ils gueuleraient comme des sourds. »
Mais aussi l'auteurs de poèmes plus élaborés et souvent plus profonds qu'ils n'y paraissent :
Madrigal
Comme il faudrait, reine de mes amours,
Un rythme aux précieux contours
Pour célébrer l’originalité
De ta fière beauté,
Je ne saurais, vois-tu, trouver des mots
Qui soient d’assez parfaits émaux
Pour enchâsser dans leurs flancs précieux
La grâce de tes yeux.
La neige auprès de toi semble du lait,
Le lys royal est ton valet,
Le cygne est blanc, mais il faut pour cela
Que tu ne sois pas là.
Il me vient plus de chaleur et d’éclat
De ton visage délicat
Que du soleil qui fait fleurir les fleurs
Aux cent mille couleurs.
Je ne sais pas de son plus étonnant
Que ton parler si doux sonnant
Et les oiseaux qui ravissent les bois
Sont jaloux de ta voix.
Auprès de toi, fleur de ma passion
Toute grâce est illusion
Et le regard d’un Dieu te fanerait
Et te profanerait.
La muse au cabaret
Chanson de Printemps
Carpe diem.
Alerte ! alerte !
Les bois, les champs
Sont pleins de chants
Et d’herbe verte.
Le gai Printemps
Arrive. Il pose
Son pied de rose
Sur les autans.
Un doux mystère
Va s’accomplir,
Et tôt remplir
Toute la terre.
Muse, debout !
Allons, Lolotte,
Voyons, ma crotte,
Debout, debout !
De ta fenêtre
Oy le babil
Du jeune Avril
Qui vient de naître.
Quoi ! ce beau temps
Ne te redonne-
T-il pas, mignonne,
Tes chers vingt ans ?
Moi ? vois ma veine,
Je crois avoir
Comme Séquoir
Dix ans à peine…
En quoi j’ai tort,
Vu que ce sage
Malgré cet âge
Est plutôt mort.
Avril est vite,
Fuitif combien !
Puisque aussi bien
Il nous invite,
Mets ton chapeau
Le plus modeste,
Fous-moi ma veste,
Allons, hop ! oh !
À la campagne
Fuyons ce veau
D’Esprit Nouveau…
Qu’il ne nous gagne.
Mais quoi ! déjà
D’ergot à crête
Te voilà prête !
C’est gentil, ça.
Vois-tu, ma reine,
Il faut aller
Nous trimballer
En des Suresne,
En des Chatou,
En des Joinville,
Des Chatnoirville
Ou, n’importe où
Propre aux bitures
— Es bord de l’eau —
De picolo
Et de fritures…
Tu m’aimeras
À la desserte,
En tout cas, certe,
Me le diras ;
C’est ton affaire.
Pour quant à moi
Sans plus d’émoi
Je ne puis faire
En ce beau jour
D’effort pour croire
À d’autre histoire
Qu’à ton amour.
Cette romance
Est folle — on sait —
Et d’ailleurs, c’est
Sans importance ;
Car — dieu merci !
Lorsque moi-même
Je dis : « Je t’aime… »,
Je mens aussi.
La muse gaillarde
Chanson de rien
Je ne suis rien et je suis tout ;
Et tant que le monde sera monde
Il en sera toujours ainsi.
Tout ce qui n’est pas c’est bibi,
Et ne sera jamais, aussi ;
Ce qui n’est plus, bibi toujours.
Le nul est un de mes rêves,
Le zéro une idée que j’ai eue
Quand je tétais encore le futur.
Je suis habillé de peut-être,
L’illusion me sert de peau
Et l’impossible est mon chapeau.
Je suis le vide qui fait : miam, miam ;
Je mâche tout le jour le vent
Et je me grise avec du flan.
Quand vous entendez le silence,
C’est moi qui hurle dans les bois
Comme si j’avais de la voix.
Je ne suis rien et je suis tout.
En vérité je ne sais si
Je me fais comprendre partout.
Suis-je fatigué de repos,
Je m’assois au bord du néant
Les pieds pendant sur l’incréé.
Je suis là, et je n’y suis pas
Tout à la fois, et cependant
On ne me trouve nulle part.
Bref, dans le vide frénétique,
Je suis l’effort que font les choses
Pour tâcher de ne pas être.
Mais aussi l'auteurs de poèmes plus élaborés et souvent plus profonds qu'ils n'y paraissent :
Madrigal
Comme il faudrait, reine de mes amours,
Un rythme aux précieux contours
Pour célébrer l’originalité
De ta fière beauté,
Je ne saurais, vois-tu, trouver des mots
Qui soient d’assez parfaits émaux
Pour enchâsser dans leurs flancs précieux
La grâce de tes yeux.
La neige auprès de toi semble du lait,
Le lys royal est ton valet,
Le cygne est blanc, mais il faut pour cela
Que tu ne sois pas là.
Il me vient plus de chaleur et d’éclat
De ton visage délicat
Que du soleil qui fait fleurir les fleurs
Aux cent mille couleurs.
Je ne sais pas de son plus étonnant
Que ton parler si doux sonnant
Et les oiseaux qui ravissent les bois
Sont jaloux de ta voix.
Auprès de toi, fleur de ma passion
Toute grâce est illusion
Et le regard d’un Dieu te fanerait
Et te profanerait.
La muse au cabaret
Chanson de Printemps
Carpe diem.
Alerte ! alerte !
Les bois, les champs
Sont pleins de chants
Et d’herbe verte.
Le gai Printemps
Arrive. Il pose
Son pied de rose
Sur les autans.
Un doux mystère
Va s’accomplir,
Et tôt remplir
Toute la terre.
Muse, debout !
Allons, Lolotte,
Voyons, ma crotte,
Debout, debout !
De ta fenêtre
Oy le babil
Du jeune Avril
Qui vient de naître.
Quoi ! ce beau temps
Ne te redonne-
T-il pas, mignonne,
Tes chers vingt ans ?
Moi ? vois ma veine,
Je crois avoir
Comme Séquoir
Dix ans à peine…
En quoi j’ai tort,
Vu que ce sage
Malgré cet âge
Est plutôt mort.
Avril est vite,
Fuitif combien !
Puisque aussi bien
Il nous invite,
Mets ton chapeau
Le plus modeste,
Fous-moi ma veste,
Allons, hop ! oh !
À la campagne
Fuyons ce veau
D’Esprit Nouveau…
Qu’il ne nous gagne.
Mais quoi ! déjà
D’ergot à crête
Te voilà prête !
C’est gentil, ça.
Vois-tu, ma reine,
Il faut aller
Nous trimballer
En des Suresne,
En des Chatou,
En des Joinville,
Des Chatnoirville
Ou, n’importe où
Propre aux bitures
— Es bord de l’eau —
De picolo
Et de fritures…
Tu m’aimeras
À la desserte,
En tout cas, certe,
Me le diras ;
C’est ton affaire.
Pour quant à moi
Sans plus d’émoi
Je ne puis faire
En ce beau jour
D’effort pour croire
À d’autre histoire
Qu’à ton amour.
Cette romance
Est folle — on sait —
Et d’ailleurs, c’est
Sans importance ;
Car — dieu merci !
Lorsque moi-même
Je dis : « Je t’aime… »,
Je mens aussi.
La muse gaillarde
Chanson de rien
Je ne suis rien et je suis tout ;
Et tant que le monde sera monde
Il en sera toujours ainsi.
Tout ce qui n’est pas c’est bibi,
Et ne sera jamais, aussi ;
Ce qui n’est plus, bibi toujours.
Le nul est un de mes rêves,
Le zéro une idée que j’ai eue
Quand je tétais encore le futur.
Je suis habillé de peut-être,
L’illusion me sert de peau
Et l’impossible est mon chapeau.
Je suis le vide qui fait : miam, miam ;
Je mâche tout le jour le vent
Et je me grise avec du flan.
Quand vous entendez le silence,
C’est moi qui hurle dans les bois
Comme si j’avais de la voix.
Je ne suis rien et je suis tout.
En vérité je ne sais si
Je me fais comprendre partout.
Suis-je fatigué de repos,
Je m’assois au bord du néant
Les pieds pendant sur l’incréé.
Je suis là, et je n’y suis pas
Tout à la fois, et cependant
On ne me trouve nulle part.
Bref, dans le vide frénétique,
Je suis l’effort que font les choses
Pour tâcher de ne pas être.
Chanson de rien
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