dimanche 22 février 2015

Amir Or


Amir Or, né à Tel Aviv in 1956, est l'auteur de neuf volumes de poésie. 

Amir Or a reçu plusieurs prix israéliens et internationaux de poésie, dont le Bernstein Prize, le Fulbright Award for Writers, le Levi Eshkol Prime Minister’s Poetry Prize, ainsi que le Oeneumi literary prize of the Tetovo International Poetry Festival (2010) parmi d'autres.

Ici

Voici ma déposition :
la cinquantaine, père d’un enfant de six ans (vous ne le voyez pas),
mettant les mots en poèmes, aimé, haï (ne pas voir ça), de fait
une sorte de créature sauvage, ainsi :
coupures à l’âme, rébellion, lèvres
trop sensibles, tous mes yeux
(comme vous voyez), et effectivement
ce qu’un miroir trahit n’est pas plus profond que ce qu’il ne trahit pas,
ce qu’un miroir reflète – est une carte de l’Être à deux dimensions,
encadrant l’apparence du Recherché. Un seul portrait
jetant un coup d’œil sur l’instant depuis la foule de l’âme ;
et l’âme ?
Que puis-je vous en montrer
que vous ne sachiez déjà ? Voici
la tige de blé qui a grandi du néant,
voici
le couteau qui l’a séparée de l’Un.

Epitaphe

Laisse ici ta route, voyageur,
Assieds-toi parmi les mûres et la vigne,
Entre ombre et eau, près de cette pierre blanche,
C'est là que je gis, petit garçon et Empereur.

Ma face marbre froid, mes mains, mes pieds,
Vêtu de lierre et de feuilles mortes,
Moi aussi, j'ai raté le lointain,
Moi aussi jadis j'ai parcouru la terre.

Laisse ici ta route, voyageur,
Ecrase à ma face ces baies sauvages.


Les barbares (deuxième round)
Ce n’est pas pour rien que nous avons attendu les barbares,
ce n’est pas pour rien que nous nous sommes assemblés sur la place centrale.
Ce n’est pas pour rien que nos notables ont revêtu leurs robes officielles
et répété leurs discours en prévision de l’événement.
Ce n’est pas pour rien que nous avons démoli nos temples
et en avons érigé de nouveaux pour leurs dieux ;
tout comme nous avons brûlé avec raison nos livres
qui n’ont rien à dire à des gens comme ça.
Comme annoncé par les prophètes les barbares sont venus,
et ont reçu les clés de la cité des mains du roi.
Mais quand ils sont venus ils ont endossé les vêtements locaux
et leurs mœurs sont devenues celles du pays ;
et quand ils nous commandèrent dans notre propre langue
nous ne sûmes plus jamais quand
les barbares étaient venus vers nous

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