samedi 22 août 2009

Takuboku Ishikawa

Poète japonais né en 1886, mort de la tuberculose en 1912.

Il commence à écrire en 1902, et est considéré alors comme le Rimbaud nippon.

Après avoir fait montre d'une inspiration naturaliste, il rejoint un groupe littéraire "socialiste" à partir de 1910.
Malade très jeune, il est contraint de gagner sa vie comme journaliste, instituteur ou correcteur d'imprimerie.
Cette partie de son oeuvre ne sera publiée qu'après sa mort.

Même si je n'ai posté jusqu'ici que des textes relativement longs, ce sont les poèmes courts qui ont ma préférence.
Bien que ceux ci soient le reflet d'une culture aux antipodes de la nôtre, ces morceaux me touchent à un titre ou un autre...

Ces haïku et tanka sont indépendants les uns des autres.

Ceux que l'on oublie difficilement

Traduit par Alain Gouvret, Yasuko Kudaka et Gérard Pfister (extraits)

À Ishikari
sur la clôture de la gare de Bikuni
des toiles rouges séchaient.

Qu'elle est triste la ville d'Otaru
dans les voix rocailleuses
de ces hommes qui ne chantent pas.


L'enfant sur le dos
elle m'accompagnait
dans la gare
des bourrasques de neige s'engouffraient
– le regard de ma femme.


Cet ami que je suis venu à haïr
longuement j'ai serré sa main
au moment de nous séparer.


Vieilli par les voyages
lorsqu'il est ivre
il récite un poème chinois écrit il y a dix ans.


À chaque inspiration
mes narines se glacent
je voulais tant respirer l'air froid.

Fumées
traduit par Alain Gouvret, Pascal Hervieu et Gérard Pfister
(extraits)

Ma sœur avait un amoureux
je me rappelle avec tristesse
mon amitié pour son jeune frère maintenant disparu.

À la fin des vacances
la jeune enseignante d'anglais
n'a pas reparu.

Quand venait l'exaltation
il pleurait agitait les mains,
il parlait comme s'il était ivre.

Il venait à ma rencontre
se frayant un chemin à travers la foule
avec son bon vieux bâton.

Jusqu'au chignon
que portait au village la femme du médecin
je le regrette.

Lui qui était malade des poumons
il se rendit au bureau du village
et y mourut.

L'amour de moi
traduit par T. Takahashi et T. Trubert-Ouvrard
(extraits)

Sur la plage de sable blanc
d’une petite île de la mer orientale
baigné de larmes, je joue avec un crabe.

Si les jeunes filles m’entendaient pleurer
elles diraient
C’est un chien malade qui hurle à la lune.

Pour si peu de chose mourir
vivre pour si peu de chose
ah ! cesse de discuter.

Cet homme qui lorsqu’il est triste
sort faire un tour sans raison
celui que je suis devenu depuis trois mois.

D’une tige de bambou
consciencieusement il frappait le chien
Je trouvais joli son visage d’enfant.

Écrasé

dans ce coin d'un train bondé

chaque soir je m'attendris sur moi-même.



Soudain une angoisse profonde

je me fige

et doucement caresse mon nombril.



Le miroir à la main

lassé d'avoir trop pleuré

j'essaie toutes les grimaces.


Je sens mon cœur

lentement s'alourdir

comme l'éponge se gorge d'eau.



Quand j'ôte le bouchon, l'odeur d'encre fraîche

descend dans mon ventre affamé

et me rend triste.



J'ai éteint la lampe

tout exprès pour me concentrer

sur des pensées futiles.



Sans but monté dans un train

quand j'en suis descendu

nulle part où aller.

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